Entre art, publicité et graphisme, cinq étudiantes du DN MADe mention graphisme vous présentent leurs projets réalisés dans le cadre du dernier workshop avec leur formateur Adam Richards, dont l’objectif était de créer un objet graphique détourné en s’inspirant des travaux de l’artiste canadienne Dana Wyse.
Pouvez-vous résumer votre travail dans le cadre du workshop ?
Mélanie Lebaillif : Pour le projet du détournement publicitaire inspiré par l’artiste Dana Wyse, j’ai choisi d’aborder comme sujet les diktats de la beauté féminine instaurés par une société consumériste. L’obsession de l’apparence physique des jeunes femmes est influencée par les nouvelles icônes de la mode, les réseaux sociaux ou la téléréalité, qui renvoient une image altérée de la féminité. Les canons de beauté instaurés sont nombreux, comme le culte de la minceur. Les grandes marques de cosmétique influencent aussi beaucoup la vision qu’on a de la femme, leurs publicités sont souvent mensongères et déforment la réalité. La chirurgie esthétique est devenue très rapidement un phénomène de mode régi par les stars des réseaux sociaux comme Kylie Jenner, véritable exemple pour des milliers de jeunes femmes qui veulent à tout prix lui ressembler quitte à réaliser des opérations de chirurgie esthétique qui par la suite peuvent entraîner des troubles identitaires, dus à l’injonction pour les femmes d’être belles, selon des canons de beauté souvent réalisables uniquement à partir d’interventions corporelles, qui peuvent être violentes et onéreuses. Pour ce projet j’ai choisi de réaliser mes supports sur le sujet de la chirurgie esthétique, en créant des réponses ironiques à ce problème. Pour traiter ce sujet je détourne les codes graphiques des grandes maisons de luxe de façon ironique et kitsch pour apporter une solution miraculeuse à ce problème de société comme avec ma pompe à lèvres Gucci et mon masque Gucci « Peau de poupée ».
Marine Vinolo : J’ai décidé d’aborder le sujet de l’agroalimentaire en dénonçant les risques qu’engendrent les produits alimentaires industriels sur notre santé. On nous pousse à la consommation avec des visuels attrayants et on nous vente des vertus énergisantes, nutritionnelles, light, etc. Si les dangers des produits gras et sucrés sont souvent dénoncés dans des campagnes sur la santé, la présence d’additifs, de conservateurs en tout genre et de particules toxiques dans les emballages sont très souvent passés sous silence. Je souhaite dénoncer ce problème social croissant en révélant les compositions chimiques dans les produits alimentaires. Ainsi, le consommateur pourrait savoir ce qu’il mange et quels dangers il risque, le but étant évidemment une prise de conscience. Si les dangers sont énoncés clairement, le consommateur prend conscience et agira de son gré, en prenant soin de son alimentation et de sa santé. Cela diminuerait les ventes et les gens se tourneraient vers des produits locaux, plus sains et plus responsables. J’ai très vite fait le parallèle entre l’alimentaire et le médicament. Pourquoi un médicament ? Parce qu’il est chimique et réalisé en laboratoire. Il est créé pour solutionner un problème ou apaiser des maux. L’agroalimentaire apporte une solution aussi : nourrir les populations et combler leur faim. Son laboratoire, c’est l’usine de production. Le parallèle m’a paru assez évident.
Graphiquement, j’ai souhaité apporter une touche kitsch à mes supports, afin de capter le spectateur tout en me moquant de l’aspect kitsch et surréaliste de l’univers publicitaire.
J’ai utilisé des images monochromes de couleur bleu électrique avec des effets de découpage/collage. Pour contraster cette teinte, j’ai utilisé du jaune. Les couleurs sont volontairement froides.
Camille Pruvot : Pour ma part j’ai choisi de dénoncer le mensonge politique (français) en mettant avant la poire à lavement en la dérivant sous deux supports : une affiche et un packaging. Je me suis inspirée de la marque de gâteaux LU en gardant les couleurs patriotiques bleu blanc et rouge. J’ai effectué diverses recherches d’inspirations politiques, graphiques et artistiques pour en arriver à cela. J’ai détourné LU en ELU, les petits cœurs habituels en petites poires… afin de renforcer l’image de la politique et mettre en avant mon objet.
Léa Perreve : Pour le projet de Dana Wyse j’ai choisi de traiter l’usage de la présence des composants animaux que l’on retrouve parfois dans les cosmétiques de luxe. Mon but est de dénoncer et de détourner les composants animaux dans ces produits. Pour cela j’ai choisi de faire un jeu de mots entre le vrai nom du cosmétique et le composant animal qu’on y trouve dedans.
Lou Navarro : J’ai choisi comme sujet les clichés féminins et féministes, car les féministes sont un sujet d’actualité dont on en entend beaucoup parler et qui me touche particulièrement. J’ai finalement choisi pour piste graphique « illustration et ortho-typographie ». J’ai tout de suite pensé à la « construction de la femme parfaite » et mon idée m’a tout de suite amené à faire d’IKEA ma ligne graphique directrice. J’ai donc fait une série de notices pour construire la femme parfaite comme premier support et comme deuxième support, un livre pour apprendre à être « parfaite comme maman ».
Qu’avez-vous pensé du workshop ?
Mélanie Lebaillif : J’ai trouvé ce workshop très intéressant et enrichissant, l’univers de Dana Wyse m’a beaucoup inspiré. N’ayant jamais réalisé de détournement publicitaire ce projet m’a permis de me dépasser pour créer des supports se rapprochant au mieux de la demande.
Marine Vinolo : J’ai apprécié travailler sur ce workshop qui m’a fait découvrir le travail de Dana Wyse. C’était intéressant de devoir s’inspirer d’une artiste contemporaine. Ses concepts sont pleins d’humour, c’était amusant de pouvoir travailler sur cet aspect.
Camille Pruvot : Ce workshop était un travail très intéressant, il a permis de s’approprier l’univers de Dana Wyse et de le penser différemment : autrement que de la création pure.
Léa Perreve : Ce projet était enrichissant, durant toute la partie recherches j’ai pu apprendre des choses sur les cosmétiques, leur fabrication… Sur la partie créa j’ai pu parcourir Illustrator, InDesign, Photoshop. Ce projet est aussi un bon exercice pour gérer le temps des rendus, apprendre à gérer son temps, s’organiser.
Lou Navarro
Que vous apporte votre formation, et que vous apporte l’alternance ?
Mélanie Lebaillif : Ma formation m’apporte une maîtrise technique et une culture graphique. Mon alternance m’apporte une forme de stabilité entre les cours et le travail en entreprise et m’a permis de découvrir le monde du travail et de me faire confiance sur mes choix graphiques.
Marine Vinolo : Le graphisme permet de s’intéresser à plein de domaines, je trouve ce métier passionnant. J’apprends à toujours aller plus loin dans mes créations, et à développer une logique et un sens visuel.
Camille Pruvot : La formation nous permet de garder un cadre scolaire avec les avantages de l’entreprise. Cette formation me permet de mettre en pratique ce que j’apprends en entreprise et vice-versa.
Léa Perreve : La formation m’apprend à comprendre un projet et le réaliser tout en ayant une deadline. Elle m’apprend aussi le métier de graphiste. L’alternance m’apprend à réaliser des projets avec une deadline également mais aussi à aboutir le projet jusqu’à la fin en le livrant au client. J’apprends le fonctionnement des logiciels, je mets aussi en oeuvre ce que j’apprends à l’école en entreprise et inversement.
Lou Navarro : Ma formation et mes professeurs m’apprennent à oser, à expérimenter. Pour ce projet, je voulais vraiment évoquer la place du sexe dans les foyers car c’est quelque chose d’important. Cependant, je n’osais pas trop faire de pictogrammes et de phrases trash. Ce sont mes professeurs qui m’ont poussée à le faire, et le rendu est vraiment cool.
Camille Pruvot
Où effectuez-vous votre alternance ?
Mélanie Lebaillif : J’effectue mon alternance dans l’entreprise HD Média groupe, qui s’occupe de la création de deux magazines : Maison Actuelle et Maison Jardin Actuelle.
Marine Vinolo : J’effectue mon alternance à l’agence le Square, à La Garenne Colombes. C’est une agence de création 360. J’apprends beaucoup dans mon entreprise ! Je dois me surpasser et produire vite et bien. C’est très formateur ! J’apprends aussi qu’il faut faire confiance à son sens d’analyse visuel et donner toujours le meilleur de soi même pour que le résultat soit payant.
Camille Pruvot : A la Mairie de Paris Centre.
Léa Perreve : J’effectue mon alternance au service communication de l’Université Sorbonne Paris I.
Lou Navarro : Je fais mon alternance dans le 2è, à Paris en tant que creative assistant dans une agence qui s’appelle Matter. J’adore travailler là-bas, l’équipe est vraiment cool et j’ai énormément de liberté pour explorer plusieurs pistes graphiques à chaque nouveau projet. Le mieux ce sont les shooting pour les clients parce que c’est souvent moi qui choisis le stylisme et qui vais acheter ce qu’il nous faut.
Marine Vinolo
Qu’envisagez-vous pour la suite de vos études ?
Mélanie Lebaillif : Pour la suite de mes études j’envisage de me diriger vers un Master en direction artistique.
Marine Vinolo : J’aimerais poursuivre mes études avec un Master de création.
Camille Pruvot : En ce qui concerne la suite de mes études je compte finir ma licence en Design graphique l’année prochaine puis partir un an à l’étranger afin de pratiquer le métier de graphiste pour ensuite revenir en France et reprendre mes études en architecture afin d’avoir des connaissances supplémentaires et devenir une personne des plus polyvalentes.
Léa Perreve : J’aimerais poursuivre mes études afin d’obtenir un Master.
Lou Navarro : Après mes deux années de Licence, je pense faire un Master dans l’édition ou me spécialiser dans la typographie. Je pense aussi à faire une année de césure à Berlin et pourquoi pas, faire mon Master là-bas après.
Quel métier vous intéresse ?
Mélanie Lebaillif : Je m’intéresse beaucoup au métier de graphiste dans un magazine de mode ou féminin.
Marine Vinolo : Plus tard, je voudrais ouvrir mon propre studio de graphisme, mêlant l’art au graphisme. Le concept du studio est encore un peu flou pour le moment, j’ai encore du chemin à parcourir, mais c’est un projet qui me réjouit !
Camille Pruvot : Je n’ai pas d’idée précise de ce que je souhaite faire plus tard mais ce que je sais c’est que je veux rester dans le milieu artistique.
Léa Perreve : Le métier qui m’intéresse est graphiste.
Lou Navarro : Je ne sais pas encore trop quel métier m’intéresserait mais ce dont je suis certaine c’est que je ne veux pas faire d’exé. J’ai besoin de liberté, de chercher, de me questionner et de réaliser mes propres projets
Mélanie Lebaillif
Quelles sont vos inspirations graphiques et artistiques ?
Mélanie Lebaillif : Mes inspirations sont nombreuses et variées : les graphistes Milton Glaser, Paul Rand, Hans Hilman, David Carson ou encore Kate Moross m’inspirent beaucoup mais aussi les photographes Man Ray, Dora Maar, Richard Avedon et Irving Penn.
Marine Vinolo : En ce qui concerne mes inspirations, je suis très souvent sur Pinterest, et je vois beaucoup de visuels très stimulants en graphisme. Sur Instagram, je m’intéresse au travail d’illustration du studio « grandpere », le studio « unplusun », le studio « WE », la galerie Almine Rech… Mes inspirations artistiques me viennent souvent du travail d’Henri Matisse, de Basquiat, d’Egon Schiele, de Kandinsky…
Léa Perreve : Je m’inspire pas mal du graphisme suisse, notamment de Josef Muller-Brockmann ou bien d’artistes tels qu’Andy Warhol pour les couleurs et Banksy pour le détournement. J’aime bien explorer Internet pour découvrir de nouveaux artistes.
Lou Navarro : Au niveau de mes inspirations graphiques, je suis abonnée à énormément de personnes sur Instagram et tout m’inspire : les tatoueurs, le design industriel, le graphisme, la typo (@wwwesh.studio / @mrzyk_moriceau / @spechtstudio / @itsnicethat). En ce qui concerne les références artistiques, je m’intéresse surtout aux architectes parce que les formes et les couleurs m’aident beaucoup dans mes travaux : Le Corbusier, Antti Lovag, Charlotte Perriand, Zaha Hadid ou encore Karim Rashid.